De Rive Gauche Magazine à Immorama, les titres de presse genevois qui sont gratuits sont plus nombreux qu’on ne le pense. Celui qui tient la palme est sans conteste le GHI (« Geneva Home Informations », tout un programme). Le canard local est même un roi en son pays ; c’est le logo qui l’affirme.

Le canard-fourmi et le géant du web

Au-delà de son contenu, et de ses sujets qui lèvent souvent des lièvres, l’intérêt de l’hebdomadaire réside dans ses petites annonces. Elles permettaient et doivent encore permettre de trouver un ou une employée de maison, du matériel d’occasion voire un appartement (mais plutôt une chambre estudiantine).

Qu’il y ait des publicités dans un journal, cela ne surprendra personne. Et dans « les gratuits », il est de notoriété publique que les articles sont disséminés dans les pages d’annonces. D’ordinaire, les annonceurs sont plutôt des restaurateurs ou des commerces locaux, moins souvent des géants de la Silicon Valley comme Google. 

Une pub Google, une pub comme les autres ?

Cette semaine-là, c’est pour un service particulier que Google s’est offert un encart publicitaire à l’attention des Genevois et des Genevoises. « Google Street View », c’est une façon de se repérer dans le monde, sans bouger de son fauteuil. Pratique, comme la plupart des outils d’Alphabet.

L’entreprise américaine, basée (aussi) à Zurich, a été habile. Elle a elle-même recouru à une technique de communication classique (la publicité traditionnelle dans les médias) pour toucher des personnes particulières (les lecteurs et lectrices du GHI). Pour Google, une pub dans le GHI a pleine de sens.

Le GHI aurait-il dû la refuser ?

Le journal de papier est loin d’être un géant. Son modèle d’affaires est mis à mal depuis l’essor de la pub en ligne. Que le GHI ouvre ses pages à Google, c’est limite la brebis qui héberge un loup avec AirBnB. À quelque part, c’est contre-intuitif. 

Et pourtant, Google Street view n’est pas Google Ads, la plateforme qui permet de lancer et de gérer des campagnes publicitaires à travers le web. Les services étant différents, le GHI ne pouvait décemment pas refuser cette demande qui le reconnaît en plus comme un acteur genevois de premier plan. Tous les gratuits n’ont pas son rayonnement — il serait le journal au plus grand tirage du canton.

Une master class américaine

Le volet commercial du GHI ne pouvait pas refuser ; il aurait même été fou de refuser. Et puis pour quel motif, au fond ? L’éthique ? La concurrence ? En matière de publicité, l’éthique dépend d’une ligne fixée par la loi, et aussi de la ligne éditoriale. On ne verra pas de réclame pour une boisson énergisante dans un magazine de santé (normalement…). 

Ainsi, la surprise de voir cette annonce de Google dans le GHI tenait moins du fond que de la forme. On imagine qu’un acteur du web ne passerait que par le numérique pour communiquer. Et quel acteur ! L’Américain a l’air de rien rappelé l’importance de sortir des sentiers battus pour une stratégie réussie. Le GHI et les médias traditionnels (print ou radio) sont et demeurent des relais à considérer dans un plan de communication. C’est sans doute la leçon principale à tirer de cette master class.

Photo: ©DR

 

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